2001 - Rennes : La place de l'histoire dans les pays celtiques aujourd'hui

[ extrait des conférences - Mercredi 25 Juillet / Rennes ]

PAYS DE GALLES.
L'intervenant gallois est le professeur Geraint H. JENKINS, directeur du Centre d'Etudes Supérieures galloises et celtiques depuis 1993, Président de la section de Celtique de L'université du pays de Galles, et par ailleurs auteur de plus de 30 ouvrages. Le Professeur Jenkins aborde le thème de l'Histoire du point de vue scolaire. L'Histoire du Pays de Galles a été bannie pendant très longtemps du système éducatif, au profit de la seule Histoire digne de ce nom, l'Histoire anglaise, c'est-à-dire de l'Empire Britannique.
"Les nations sans Histoire sont condamnées à périr". En ce sens, le maintien de l'identité Galloise tient du miracle. Car les enfants gallois furent longtemps élevés dans la fierté d'appartenir à cet Empire qui régissait 340 millions de personnes et sur lequel jamais le soleil ne se couchait jamais. "Honore le drapeau, cher enfant, et rappelle-toi chaque jour que tu es sujet de la Couronne". Et le jour de la fête de l'Empire, on les faisait s'enrouler dans l'Union Jack. Les religieux quant à eux s'intéressaient principalement à l'Histoire de la Palestine.
L'enseignement de L'Histoire galloise est restée longtemps négligée, y compris semble-t-il, à l'Université, puisque Saunders Lewis en 1945 déclarait que "la nation galloise n'avait pas d'Université" parce que l'Université dite du Pays de Galles se détournait elle-même de l'Histoire et de la culture Galloises. Il a fallu attendre les années 70 et 80 pour que les Gallois commencent à demander qu'on leur enseigne leur Histoire. On doit énormément à Gwyn Alfred Williams (mort en 1995), surnommé "l'historien du peuple" parce qu'en 1984, il a commencé à populariser l'Histoire galloise à la télévision, avec verve, humour et une grande liberté de ton à l'endroit de l'Histoire Anglaise officielle: "LLoyd George ne connaissait pas mon père, mais je suis plutôt content qu'il n'ait pas connu ma mère"...etc!
Pour terminer sa communication parsemée d'allusions à la Bretagne nation-soeur, le professeur Jenkins revient sur le 18° siècle pour évoquer Edward Lhuyd, philologiste, botaniste, historien etc. considéré en Galles comme le père des Etudes Celtiques. ("Nous ne serions pas là sans lui") : Il y a 300 ans il avait accompli une tournée de 4 années à travers les Pays Celtiques, il fut même jeté en prison à Brest, car suspecté d'espionnage et qui déclarait dès cette époque: "I don't profess to be an Englishman but an old Briton". Mr Jenkins évoque enfin les deux figures bretonne et galloise de la tradition romantique : Iolo Morganwg et La Villemarqué qui se rencontrèrent à l'eisteddfod d'Abergavenny en 1838. Il invite la Branche Galloise qui recevra le Congrès Celtique à l'été 2002 à honorer ces figures elles-mêmes entrées dans l'Histoire celtique.

KERNOW.
Mr Treve CRAGO, représentant la Cornouailles est historien et chercheur à l'Institut des Etudes Cornouaillaises.Il travaille sur les archives du Gorsedd de Cornouailles ainsi que sur la Tradition Orale. Il retrace l'historique du mouvement cornouaillais et des différentes associations qui ont successivement vu le jour tout au long du 20° siècle: d'abord la Société Cornique née en 1902, suite à l'Esteddfod de Bangor, à l'initiative de Barzh-Glas, "le Barde bleu" qui avait choisi ce nom parce qu'il avait la particularité d'être habillé des pieds à la tête dans cette couleur. L'attrait pour la Cornouaille et son Histoire relevait alors d'une aimable fantaisie pour certains personnages aisés sans que ne soit remis en cause leur loyauté à l'Empire.
Cet intérêt pour le patrimoine Cornique permit néanmoins de sauver ce qui n'avait pas encore disparu. On ne savait déjà plus les danses corniques, mais les airs, si ! Jenner, une personnalité très charismatique (qui pour autant, parait-il, n'aurait jamais su changer une ampoule) contribua beaucoup, avec Ross, à revitaliser la langue cornique. Il crée la Conférence Celtique en 1917. Il sera le premier Grand Barde Cornique en 1928.
Deux autres associations naissent par la suite: Tia Tavas en 1932, organise camps de jeunesse et services religieux en Cornique. Puis ce fut Mebion Kernow, créée en 1951. Treve Crago précise que toutes les deux sont nées à l'issue d'un Congrès Celtique tenu en Cornouailles. le mouvement cornique est progressivement passé d'une conception romantique et "aristocratique" à une conception à la fois plus globale, plus réaliste, plus en phase aussi avec le peuple de Cornouailles. Le drapeau de Saint Peran est devenu un emblème national, arboré aussi par les supporters de l'équipe cornouaillaise de rugby.